À la merci de l’erreur
À la merci de l’erreur et à la joie de découvrir un autre point de vue, une autre façon de faire, une nouvelle compréhension et de nouveaux potentiels. Car l’erreur est une formidable opportunité d’interroger nos acquis, de revisiter nos convictions et d’ouvrir nos champs de vision.
Croire que le monde se résume aux paysages perçus depuis la fenêtre de notre chambre est une erreur, mais si nous ne commençons pas par visiter ces espaces, par en entrevoir les confins et les dépasser, nous nous cantonnons à évoluer dans une géographie figée et nous n’explorons rien, pas même nos limites.
L’erreur procède toujours d’une tromperie que nous inflige l’esprit qui pense à la mesure de ce qu’il est en capacité de percevoir et de comprendre. En imaginant le monde à partir de son regard elle s’attache à cette référence, souvent sans nuance.
Mais nous sommes à la merci de l’erreur pour le plus grand bien de notre évolution, car sans elle, sans son absolue nécessité pour relativiser nos repères, nous resterions enfermés dans des représentations dont nous nous satisferions, sans réaliser qu’elles nous enchaînent dans la prison d’opinions limitatrices.
L’erreur est un tremplin vers demain quand elle est reconnue ; une justification d’hier quand on la nie par crainte d’être déstabilisé. Nous sommes pourtant à sa merci pour progresser, car c’est en osant l’erreur que celui qui ne sait pas encore, qui n’a pas encore essayé, ou qui n’a pas encore compris s’engage dans l’aventure du futur.
C’est en se trompant de chemin que se déploie l’insoupçonné et son lot de surprise ; l’erreur introduit, quand elle est avérée, une correction ; correction d’impression, correction de trajectoire, correction de devenir ; correction non pas à l’encre rouge et au jugement dévalorisant, mais correction qui invite à se réjouir de cette conquête qui transforme nos états d’être.
L’erreur est humaine, elle est un don de Dieu pour que l’humanité se fraye un chemin jusqu’à lui. Elle résulte d’une capacité à connaître et à décider dans des cadres contextuels particuliers et donc nécessairement limités. Elle surgit pour dire qu’il convient d’élargir nos perspectives pour investir un ailleurs capable d’enrichir la conscience.
C’est grâce à cette quête de l’au-delà, aux revisites intelligentes des erreurs qui s’affichent, aux sorties des ornières de nos travers, que nous quittons l’espace des apparences et des certitudes légitimant le passé, et que nous inventons les solutions idoines qui inévitablement paraîtront erreur quand nous en aurons révélé l’ensemble des potentiels.
Car l’erreur est une révélation. Révélation de ce qui paraît, révélation de ce qui nous a trompés, révélation d’un après, révélation d’une recherche et révélation permanente que nous sommes sans cesse en évolution. Sans erreur et sans sa reconnaissance, pas de possibilité d’évoluer, car nous serions alors englués dans une éternité conceptuelle figée et sclérosante.
À la merci de l’erreur, et merci l’erreur qui nous sort d’une identité de vieux sachants qui n’ont rien, vraiment rien de vieux sages.