L’écoute est un renoncement
L’écoute est un renoncement.
Elle demande de se démettre des certitudes et des a priori pour rejoindre un espace en suspend, où rien ne se dit, mais où tout peut s’entendre si l’on accepte de séjourner au sein du silence matriciel d’où germent les mots et les idées venant d’un territoire oublié.
L’écoute requiert une pause ; un temps d’apnée pour que les vibrations de l’inaudible se révèlent et prennent corps dans l’espace de notre pensée.
L’écoute est une attitude méditative, exigeante ; la maintenir impose une tension permanente, une volonté sans faille pour ne pas emplir de tous nos bruits, cet espace de vacuité qui recueille ce qui cherche à se dire.
L’écoute, dans la relation à l’autre c’est aussi l’abandon de son savoir, de son vouloir, de son espoir pour accueillir ce qu’il est, adulte, enfant, semblable ou dissemblable.
À défaut, nos mots tombent à plat, blessent ou se transforment en maux, car nul besoin d’écoute pour dire !
Chacun peut aussi s’écouter lui-même, chercher à entendre les accords que ses dits composent pour nourrir le bien commun.
Alors, dans l’intime de l’écoute, une invitation à épouser le silence pour gagner en intériorité se dévoile. L’écoute de notre dimension fondatrice se construit et avec elle, la possibilité d’émettre des sons revisités.
L’écoute est aussi un pilier de l’éducation. Plutôt que de demander aux élèves d’écouter ce que les adultes veulent leur inculquer, cherchons à écouter les enfants en leur prêtant notre attention ; comprenons leurs besoins et offrons à tous, la possibilité de rejoindre leur être profond, pour un plein épanouissement.
L’écoute est toujours un renoncement. Une façon de préparer un rendez-vous inédit qui réclame présence et virginité.
À chaque instant, l’occasion de renaître dans cette innocence reconquise se propose pour approcher et accueillir le monde, débarrassés des mémoires qui obstruent les canaux de nos entendements.
Renoncer à nos déjà-vu, déjà-su, déjà-compris, pour retrouver la virginité de celui ou celle qui est prêt, riche de son discernement à accueillir l’ensemble des possibles et à les ordonner du haut de sa sagesse.
Car renoncer au passé ce n’est pas l’oublier mais en extraire l’essentiel qui oriente dans l’insondable du silence. Alors, sur cette toile sonore immaculée, les vibrations dessinent les mots qui viennent se dire, nous dire et nous conduire.
L’écoute c’est aussi, ce qui nous met en phase avec l’autre, avec l’avenir, avec l’inconnu et nous secrète à l’oreille ce que la vie cherche à nous présenter.
C’est en cherchant le juste équilibre entre écoute, silence, et capacité à le traduire qu’ensemble nous contribuons à l’éducation de tous pour créer le monde de demain. Et cela commence en silence !