Entre nous, entre tous
L’interdépendance est un fait établi dont nous occultons l’évidence tant elle est naturelle. La Terre nous porte, la nature nous nourrit, l’atmosphère fournit les conditions indispensables à l’existence Terrienne et nous prenons allègrement selon nos besoins et bien au-delà, mais qu’offrons-nous en retour ?
Les justes relations se doivent d’être harmonieuses, équilibrées au sein d’un mouvement régénérateur. À défaut, “l’étriquation” nous guette et le délitement du vivant par habitude, par automatisme, fige le mouvement dans la routine, cette tendinite de l’esprit qui engourdit les idées et leur potentiel novateur.
Alors guindés dans nos penchants, nous évoluons sans conscience de notre profonde et perpétuelle interdépendance.
Rien ne subsiste pourtant isolément ; nul organisme vivant ne naît indépendamment de la biosphère, et les relations entre tous n’échappent pas à cette inévitable interconnexion. Le professeur a besoin de ses élèves pour exercer, le musicien de ses auditeurs pour partager sa musique, l’épicier de ses clients et les clients de l’épicier, le maraîcher de la terre et des consommateurs. Mais alors pourquoi continuons-nous à nous agiter dans le bocal de nos histoires sans réaliser avec gratitude notre communauté ? Sans elle nous ne sommes rien.
Les tracas, eux-mêmes, sont bienfaisants ; ils interrogent nos fâcheuses traversées et proposent de les traiter, sauf à les subir dans le fatalisme et la plainte. Mais, là encore l’interdépendance est à l’œuvre ; elle s’applique aux situations, aux circonstances qui nous permettent de rejeter sur l’autre, individu ou évènement, la responsabilité de notre vécu. Que ferions-nous sans lui, que ferions-nous si nous ne pouvions pas accuser quelqu’un des malheurs ou des difficultés qui s’abattent sur nous ?
Là encore, le plaintif peut remercier de trouver une cause à son mal être ; il peut se délecter de ce qui lui arrive sans chercher à s’en émanciper, car la cause lui est étrangère.
Cela prouve également un besoin fondamental d’être en lien et l’impossibilité de vivre sans référence à l’autre. Quoi qu’il se passe, nul ne peut exister sans environnement ni contexte.
L’interrelation est un principe s’exprimant à l’intérieur comme à l’extérieur de nous-mêmes. Dans le microcosme savamment pensé du corps humain, les échanges cellulaires et systémiques sont intensifs et permanents ; tout y est relié et fonctionne dans un tempo orchestré par un souffle qui vient et se retire à chaque incarnation.
Centrés sur notre petit quotidien nous oublions, dans le grand ordonnancement au sein duquel nous évoluons, notre part de passeur, d’échangeur, de donneur, de preneur et la partition que nous devons jouer au cœur de l’orchestre alentour.
L’interrelation conduit à la responsabilité bienveillante et au bien commun quand elle s’habille de compréhension aimante ; à l’exploitation des uns par les autres quand l’amour est égoïste.
À nous de choisir l’attitude avec laquelle nous sommes en phase, mais de grâce cessons de nous plaindre, car le plaintif ne veut rien de mieux pour lui-même ni pour le monde. En attribuant à l’autre la paternité de ce qui lui arrive, il se cantonne à l’impuissance.
Tout interagit ; ce que nous initions influence le champ global. Nos couacs sont des fausses notes qui renforcent la cacophonie ambiante. Il va nous falloir découvrir la musique et jouer notre note la plus claire pour concourir à l’amélioration du chant relationnel, du chant social et du chant planétaire.
Ainsi la chorale humaine consciente de l’impact de ses gestes, de ses pensées, de ses émois, sur le climat général adoucira les relations. L’interdépendance rend chacun responsable à l’émission comme à la réception. Elle fournit à tous, un boulot à plein temps, car les justes relations avec l’ensemble exigent notre présence à chaque instant.
Chouette, nous ne sommes pas seuls et le programme est alléchant, quel que soit l’instant, il demande simplement d’avancer sur le sentier d’amour.
Entre nous, entre tous, ce doit être possible.