Mauvaise humeur

 In La rubrique de Frédérique

Quand mauvaise humeur donne le ton du jour, elle colore le quotidien d’un air de grisaille et lui donne un goût rageur et défaitiste.
Mauvaise humeur surgit sans crier gare, sans raison apparente ; au détour d’un chemin ou au sortir du lit, elle vient envahir notre aura qui ne voit plus le monde qu’à travers le ronchon. Elle imprègne tous les interstices du déroulé de nos actions, de nos pensées et colle son masque d’insatisfaction à chaque instant traversé. Car ceux-ci sont des instants où rien ne va plus, des épisodes de ras-le-bol, de verre à moitié vide, des moments où l’on souhaite autre chose, sans pour autant savoir clairement ce que l’on voudrait.

Et c’est là, à ces heures particulières que la voiture choisit de ne pas démarrer, qu’on ne retrouve plus ses clés, qu’on attend des plombes à la caisse alors qu’on est pressé. C’est là que dans la vibration du morose, la vie devint pensum. Alors s’enchaînent une à une les étapes du « c’est à faire », « c’est prévu », « c’est mon boulot », « c’est mes loisirs » dans un souffle de plainte, de colère, de pessimisme, voire de dégoût. Mauvaise humeur est là et ça râle dans les chaumières, ça râle et ça pollue l’ambiance ; l’ambiance de la maison, mais aussi l’ambiance alentour chargée de toutes les râleries des uns et des autres qui s’agglutinent en nuages qui assombrissent le ciel.

Quand mauvaise humeur s’invite, elle nous coupe de l’autre, elle nous isole dans un flot de miasmes qui collent à la peau et nous voilà aptes à penser que nous n’avons pas de pot. Décidément le sort s’acharne contre nous, et il ne manquait plus que ça pour ajouter une louche de mal-être à la situation déjà mal engagée. Il ne manquait plus que ça, comme si nous n’étions pas déjà suffisamment affectés par la tournure du quotidien. Il ne manquait plus que ça pour atteindre parfois une overdose de mauvaise humeur, un « trop plein » de contretemps, de tuile et d’emmerdes pour finalement réussir à sourire et même à rire d’une situation où rien ne va plus.

Mais dès que le sourire s’insinue vient la libération. Mauvaise humeur se demande alors où est l’essentiel, où est le grave et le pas grave. Mauvaise humeur pense souvent que ce qui lui arrive est grave, même quand ça ne l’est pas, car mauvaise humeur est centrée sur son nombril au-delà de toute objectivité.
Quand mauvaise humeur est là, nous sommes des nombrils du monde portant toute la lourdeur de notre centre de gravité ; quand elle s’atténue nous sommes des parties du monde capables de jouer et de danser avec ce que la vie propose et ce que nous sommes en capacité d’assumer et d’offrir. Mauvaise humeur est un passage que le sage observe avec détachement pour que l’humeur devienne humour, capacité de rire de soi, afin de guérir de nos maux illusoires.
Donc à choisir, mieux vaut porter bonne humeur dès le réveil pour accompagner nos tribulations diverses… suffit pour ça de se donner moins d’importance.
Facile, non ?

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