Merci

 In La rubrique de Frédérique

Qu’on le prononce ou qu’on l’attende, merci, comme bonjour ou bonsoir dépend de l’intention de celui ou de celle qui l’emploie. Selon les dispositions qui président à son énoncé, il est un sésame qui n’ouvre pas sur les mêmes mondes. Merci adressé à l’autre, quand il n’est pas de circonstance, quand il n’est pas un petit mot convenu, une politesse qui s’évertue à coller à des codes bien rodés, quand il n’est pas de convention, merci met en joie.
Pouvoir dire merci, même muettement devant un paysage, devant une situation, à quelqu’un, dans un moment de partage, pour le bonheur d’un travail accompli ensemble dans la plus grande fluidité ; pouvoir dire merci dans la vérité de l’instant, nous met en phase avec notre profonde humanité, avec notre liberté d’être.

Mais attendre un merci, attendre une reconnaissance est un biais qui nous coupe sournoisement de notre communauté ; attendre de l’autre qu’il nous gratifie de sa satisfaction ; chercher à ce qu’il nous donne une place que nous ne nous reconnaissons pas nous-mêmes, c’est quêter un regard qui nous inscrit dans une relation, comme si la relation nous échappait, comme si nous doutions nous-mêmes du lien et que nous attendions une preuve de son existence.
Attendre un merci nous met en position de dépendance, en position de consommateur d’échange ; c’est une position de prédateur ! un peu comme si nous apprivoisions l’autre pour qu’il nous rende au double, voire au centuple ce que nous lui avons offert en tout intérêt. Mais cela aussi parle de notre humanité !

Attendre d’être remercié c’est attendre une reconnaissance, mais il arrive aussi que nous soyons remerciés, congédiés, et là le merci que nous recevons est un coup de poignard ou une claque qui peut nous anéantir, sauf à se dire qu’il est des moments difficiles que nous pouvons remercier pour quitter des zones de confort et entrer dans d’autres qui peuvent ouvrir des horizons. Alors, dire merci sans aucune attente devient l’attitude intérieure qui gouverne nos pas, nos émois, nos pensées. La gratitude devient ainsi la grande attitude qui nous inspire et que nous expirons.
In fine, la liberté réside dans l’acte de conspirer, dans ce possible qui nous est offert de respirer ensemble le bon le bien le vrai, au rythme de notre adelphité. Dès lors, nous sommes en état de remercier à chaque instant l’occasion qui nous est donnée d’être passeur d’essentialité.

Merci au souffle qui nous traverse, merci au jour qui se lève, à la nuit qui arrive ; merci à l’enthousiasme qui nous porte, merci même aux douleurs et autres difficultés qui mobilisent nos forces pour que nous en triomphions, car tôt ou tard, dans cette vie ou dans une autre, nous viendrons à bout de toutes les situations problématiques qui nous sont présentées ; celles-ci viennent aussi dire quelque chose de notre humanité et du travail qui nous incombe individuellement et collectivement.
Merci la vie, dont nous sommes échantillons en mouvement, merci d’être ensemble, merci à l’ensemble et merci simplement à la magie de notre communauté.
Merci.

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