Tergiverse
Tergie verse à droite, Tergie verse à gauche, Tergie verse, mais ne tombe pas. Tergie cherche le bon moment, la bonne allure, le bel équilibre qui lui permettra de trouver la stabilité heureuse. Mais Tergie se trompe d’objectif, car il n’y a pas de stabilité pérenne. Tôt ou tard, s’insinue le déséquilibre qui vient interroger le bel d’accord que rien ne dérangeait. Et c’est tant mieux, car Tergie perdrait son identité en ne versant plus d’un côté ou de l’autre. Tergie se tient droite dans ses bottes et regarde fixement un avenir qui lui semble n’avoir rien de trompeur.
Tergie est féminine, car c’est un atout yin que de s’interroger et de s’intérioriser pour découvrir l’aspect instable qui se loge en elle. Tergie est féminine, mais n’épargne pas le masculin, car le yang séjourne à l’intérieur de tout un chacun. Et voilà donc Tergie en proie à des atermoiements quand il s’agit de choisir ou de tenir une note qui engage et transforme. Car s’il était facile de ne pas verser, Tergie aurait déjà choisi l’évidence qui s’imposait à elle. Tergie sait très bien que tout choix l’engage et qu’il est des engagements qui changent le sens du quotidien, des engagements qui amènent des renoncements, des renoncements qui amènent des abandons, des abandons qui réveillent des tristesses, des tristesses qui réveillent des insécurités, des insécurités qui réveillent des peurs et des peurs qui amènent Tergie à verser dans un immobilisme qui prône une absence de « trancher dans le vif » pour ne pas risquer de ne plus pouvoir garder le passé.
Tergie verse vers l’avenir sans vouloir quitter le passé, et en allant de l’un à l’autre, elle n’est pas dans le présent, mais dans le sur-place, ce qui évidemment l’insatisfait. Car, Tergie a beau tergiverser, elle sait parfaitement reconnaître l’inconfort de ne pas être à sa place. Cet inconfort qui colle au non-choix, cet inconfort qui sous couvert d’harmonie où d’équilibre maintient en l’état ce qui, de fait s’avère obsolète, mais que l’on garde pour rester en terrain connu. Tergie verse jusqu’au moment où elle ose quitter le terrain connu pour une terre inconnue.
Tergie continue alors de verser, mais là c’est dans une nouvelle vision qu’elle décide de s’installer. Il y a toujours une direction à emprunter, et quand Tergie l’a compris, elle ne se berce plus de l’illusion du ménagement ; l’engagement ne ménage pas, bien qu’il impose de faire le ménage dans bien des fonctionnements.
Tergiverser ou devenir ? Un choix parfois cornélien, mais c’est là, le gai de l’évolution, comme d’ailleurs les gués qu’il nous faut traverser quand il s’agit de choisir.
Verseras-tu, verseras-tu pas ? Tergie ne sait pas ; elle est dans le flou ; ouverte aux possibles, sans toutefois cibler le prochain pas. Mais faut pas croire, Tergie sait comme les chats retomber sur ses pattes.
Et nous, où allons-nous ? À droite, à gauche, au centre ? Ça ne manque pas de voies à emprunter…